Gordes (à la recherche de Willy Ronis)
L'été dernier, en revenant du sud, j'ai choisi les petits chemins et les détours; Je voulais depuis
longtemps aller trainer un peu dans le Lubéron et principalement à Gordes.
Classé comme un des plus beaux villages de France il est également pour moi, l'endoit où,
au sortir de la guerre, Willy Ronis s'est installé avec sa famille dans une ruine du village.
La mélancolie du photographe est composée du contraste entre le bonheur de la prise de vue
et l’incertitude de la destinée de l’image.
(Willy Ronis)
C'est dans cette première maison (il en a acheté une autre dans les années 70) qu'il a réalisé une
photo que j'aime beaucoup "Le nu provençal" mais également "Vincent aéromodéliste" et encore
bien d'autres toutes aussi remarquables.
Willy Ronis est pour moi l'incontournable, le plus grand photographe humaniste du siècle et
j'avais envie de retrouver des traces de lui dans ce village.
Quatre photos de Willy Ronis prises à Gordes dans les années 1950
La belle image est une géométrie modulée par le cœur
(Willy Ronis)
Photo argentique - Yashica Mat 124, Ilford FP4+
Nous ne voyons pas les choses comme elles sont. Nous les voyons telles que nous sommes.
(Willy Ronis)
Série vieux murs, fenêtres et volets !
J'avais préparé mon périple et je savais que les maisons de Ronis n'avaient pas gardé traces
de son passage, qu'elle n'étaient pas devenues des musées, mais un site donnait quelques
indications, une maison aux volets bleus, chemin de ...
J'aime saisir ces brefs moments de hasard, où j'ai l'impression qu'il se passe quelque chose,
sans savoir quoi précisément, et ce quelque chose me trouble beaucoup.
(Willy Ronis)
Photo argentique - Yashica Mat 124, Ilford FP4+
A la question "Qu'est-ce qu'une photo réussie ?", je me contente, faute de mieux, de répondre:
" Celle par laquelle j'ai su communiquer l'émotion qui l'a fait naître".
(Willy Ronis)
Pharmacie - Boulangerie, il faut savoir multiplier les ventes !
Gordes est, comme tous les beaux villages, devenu un site à touristes (même début septembre),
où l'on vous oblige à un stationnement payant loin du centre ville, un lieu magnifique où
des voituriers (en tenue ridicule) vous accueillent si vous avez réservé dans l'hôtel 5 étoiles
(ce n'était pas mon cas), et surtout un endroit où l'on cherche à vous vendre du souvenir inutile
et pas à vous accueillir ...
Gordes a été la résidence de Vasarely (quelques tableaux sont représentés sur les murs de la
ville et le château a été pendant une période son musée), Chagall, Wolinsky, Izis, Silvester...
De nombreuses personnalités y ont encore leur maison.
Mais de pancarte ou de trace des habitations de Willy Ronis, point !
Au dessus un tableau de Victor Vasarely
En 1948, les époux Vasarely tombent amoureux de Gordes où sera ouvert un musée Vasarely.
Nicoletta - Les volets clos - B.O.F "Les volets clos"
On remarque, paraît-il, une certaine mélancolie dans mes photos. Cela s’explique. J’ai eu beaucoup
de loisirs forcés au cours de périodes de sous-emploi ; autant meubler ces vides avec la chasse
aux images. Mais de telles conditions n’inspirent pas la joie, surtout qu’entre deux pressions sur
l’obturateur on se dit qu’on travaille pour le tiroir. Mes chasses joyeuses, je ne les vécus que
lorsque je volais mon temps à celui que je devais consacrer au travail commandé, ou lorsque
le déclic provoqué par un événement inattendu faisait monter la fièvre des grandes émotions.
Mélancolie souvent, mais pas pessimisme ; ça ira mieux demain.
(Willy Ronis)
Photo argentique - Yashica Mat 124, Ilford FP4+
Faire la photo d’abord, réfléchir ensuite – si j’en ai le temps – ou penser aussitôt après que j’ai
peut-être déclenché trop vite et voir si je peux recommencer, en mieux. Surtout ne jamais
perdre du temps à peser soigneusement ceci ou cela.
(Willy Ronis)
Sauf rares exceptions, je ne mets pas en scène, je négocie l'aléatoire.
(Willy Ronis)
Pourtant j'en ai fait des ruelles, des escaliers, des chemins qui ne menaient nulle part, des pas
et des recherches aidé de gogolmap avant de me décider, vaincu, le soir tombant à abandonner
ma quête ...
Il y a dans mes photographies un amour de la femme, un amour des enfants, de ceux qui
travaillent... Tout ce que j’aime. Je montre ce qu’il faut préserver.
(Willy Ronis)
Après tous ces sentiers, ruelles et escaliers il était temps de se poser un peu à l'ombre du
Château et d'aller boire quelque chose de frais. (C'est là où les choses se compliquent ...)
Histoire de gâcher la visite, vers 18h30, la déshydratation approchant, un verre sur la place
devant le château n'était pas superfétatoire, mais là, que nenni, les bars restaurant fermaient
les uns après les autres, histoire sans doute de se refaire une petite beauté avant d'ouvrir la
partie restaurant!
C'est donc la gorge sèche et le cœur un peu gros que j'ai dû quitter Gordes ce soir là.
C’est la perception du temps fort qui commande le déclic, cet instant où nous estimons, au
terme d’un rapide balayage du champ couvert par le viseur, que nous tenons, rassemblées
dans une composition idéale, les diverses figures articulant ce ballet dont le chorégraphe,
souvent génial, a pour nom le Hasard.
(Willy Ronis)
Un peu triste de ne pas avoir trouvé trace de Willy Ronis, comme s'il n'était jamais venu ici,
comme si la photo était encore un art mineur et déçu également de l'accueil (ou plutôt de
son absence) de la part des "marchands du temple" qui détruisent petit à petit tous les
beaux endroits !
L’aventure ne se mesure pas au nombre de kilomètres... L’émotion, si vous en êtes digne,
vous l’éprouverez devant le sourire d’un enfant qui rentre avec son cartable, une tulipe dans
un vase sur lequel se pose un rayon de soleil, le visage de la femme aimée, un nuage au-dessus
de la maison.
(Willy Ronis)
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Bonne semaine ensoleillée à vous
N'oubliez pas le guide :-)
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